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L’orme dérive au fil des eaux

jeudi 1er avril 2010

L’orme des rives ou orme nain (Ulmus asnapii) est-il condamné en France ?


Si certaines plantes à fleurs? sont fécondées par le transport du pollen? par le vent (bouleau, saule, etc.), beaucoup le sont par l’intermédiaire d’animaux pollinisateurs. Il s’agit souvent d’insectes mais aussi — dans des pays exotiques — d’oiseaux mouches ou de chauves souris. Saviez vous que, près de chez nous, les poissons le sont parfois.

C’est ainsi que l’orme des rives a basé sa reproduction sur la pollinisation par des abletttes (Alburnus alburnus) mais ne pouvant se reproduire que lors des inondations printanières — notamment tout début avril — lors desquelles les rives sont inondées et les plantes ligneuses accessibles aux poissons. La régulation des crues imposée par l’urbanisation et l’agriculture industrielle a compromis son avenir.

Moins de crues, moins d’accès aux poissons aux fleurs à croquer. En l’occurrence, celles-ci sont formées d’une partie tendre et très riche en protéines que les poissons venaient brouter, délaissant la partie dure. Se faisant, leur museau était maculé d’une matière visqueuse? contenant du pollen que l’ablette en broutant une autre fleur sur un autre arbuste? frottait contre le pistil? de celle-ci. Quant aux quelques exemplaires conservés, à la ferme du Héron (Villeneuve-d’Ascq) dans la collection de clone d’ormes de Nord-Picardie ayant résisté à la terrible maladie de la graphiose de l’orme, ils sont actuellement en mauvaise santé et leur avenir est compromis.

En cette année mondiale de la biodiversité et comme cette plante est en limite sud de son territoire (elle est d’ailleurs inscrite sur la liste rouge régionale (et protégée par l’arrêté du 1 avril 1991 « relatif à la liste des espèces végétales protégées en région Nord-Pas-de-Calais complétant la liste nationale ») des espèces? menacées, il est question de revoir lorsque c’est possible la gestion du réseau aquatique local pour favoriser l’extension des zones inondables qui par ricochet protégeraient les zones urbanisées. Ainsi une partie certaines zones gérées par l’ENLM (Espace naturel Lille-Métropole) sur Deulémont et sur Forest-sur-Marque seraient rendus au régime naturel des crues.

Cela suffira-t-il à sauver cette espèce rare ?

Claude Delattre

Pour info et hors canular, les poissons peuvent, comme les oiseaux et les mammifères (entre autres), participer à la dispersion des graines. C’est le cas dans le bassin de l’Amazone et probablement ailleurs.